Page images
PDF
EPUB

Alter erit tum Tiphys, et altera quæ vehat Argo
Delectos heroas: erunt etiam altera bella,

Atque iterum ad Trojam magnus mittetur Achilles.

Hinc, ubi jam firmata virum te fecerit ætas, (6
Cedet et ipse mari vector, nec nautica pinus
Mutabit merces; omnis feret omnia tellus :
Non rastros patietur humus, non vinea falcem ;
Robustus quoque jam tauris juga solvet arator :
Nec varios discet mentiri lana colores;
Ipse sed in pratis aries jam suavè rubenti
Murice, jam croceo mutabit vellera luto;
Sponte sua sandix pascentes vestiet agnos.

Talia sæcla, suis dixerunt, currite, fusis
Concordes stabili fatorum numine Parcæ.

Aggredere o magnos, aderit jam tempus, honores, Cara deûm soboles, magnum Jovis incrementum! Adspice convexo nutantem pondere mundum, Terrasque, tractusque maris, coelumque profundum;

Fera gémir ses champs par le soc entr'ouverts,
Et, la rame à la main, doit sillonner les mers.
Sous un autre Tiphys, les déserts d'Amphitrite
De nos vaillants guerriers transporteront l'élite :
On verra la Discorde agiter son flambeau,
Et descendre à Pergame un Achille nouveau.
Mais sitôt, noble enfant, que la force de l'âge
Vous aura du nom d'homme inspiré le courage,
L'océan sera libre, et les peuples rivaux

N'iront plus loin du port trafiquer sur les eaux:
Tout doit naître en tous lieux; égale en ses largesses,
La terre épanchera d'uniformes richesses;
La vigne, les sillons, ne supporteront plus
Du fer et des rateaux les efforts superflus;
Nos bouviers satisfaits ouvriront la prairie
Aux taureaux orgueilleux de leur corne affranchie;
La toison n'osera, par un luxe usurpé,
Sous de fausses couleurs mentir à l'oeil trompé ;
Et la douce brebis, la chèvre pétulante,
Brilleront dans les prés d'une pourpre opulente.
Oui, déjà les trois soeurs ont dit à leurs fuseaux :
Courez, sans vous lasser filez des jours si beaux.
De combien de respects vous obtiendrez l'hommage!
O du grand Jupiter majestueuse image!

Voyez, à votre aspect, les cieux, les éléments,
Le monde s'agiter sur ses vieux fondements:

Adspice venturo lætentur ut omnia sæclo.(7

O mihi tam longæ maneat pars ultima vitæ, (8 Spiritus et, quantùm sat erit tua dicere facta! Non me carminibus vincet nec Thracius Orpheus, Nec Linus: huic mater quamvis, atque huic pater, adsit; Orphei, Calliopea: Lino, formosus Apollo: Pan etiam Arcadiâ mecum si judice certet, Pan etiam Arcadiâ dicat se judice victum.

Incipe, parve puer, risu cognoscere matrem; (9
• Matri longa decem tulerunt fastidia menses:
Incipe, parve puer: cui non risêre parentes,
Nec deus hunc mensâ, dea nec dignata cubili est.

D'un siècle de bonheur tout ressent la promesse.

Oh! si vers ces beaux jours conduisant ma vieillesse, Les dieux, pour vous chanter, me laissaient des accents! Qui pourrait égaler mes succès renaissants!

Oui, le Pinde à ma gloire élevant un trophée,
Me nommerait vainqueur de Linus et d'Orphée;
De Linus et d'Orphée, en tous lieux reconnus,
L'un, pour fils d'une muse et l'autre de Phébus.
C'est vainement qu'un dieu soutiendrait leur génie,
On verrait le dieu Pan, le dieu de l'Arcadie
Lui-même, s'effrayer d'un combat inégal,
Et l'Arcadie entière applaudir son rival.

Vous, par un doux instinct que la nature inspire,
Connaissez votre mère à son tendre sourire;
Combien de pleurs sur vous ont répandu ses yeux
Soyez digne, en l'aimant, d'être assis près des dieux.

REMARQUES

SUR L'ÉGLOGUE QUATRIÈME.

PLUSIEURS critiques ont trouvé le ton de cette églogue trop élevé; ils n'ont pas fait attention que c'est le poète qui parle lui-même, et qu'il a dû prendre un ton convenable à son sujet. Les bergers, dans leurs chansons, doivent avoir un langage simple et naïf, mais il faut croire que le poète peut, sans manquer aux règles, se montrer quelquefois audessus des bergers qu'il met en scène. Avant Virgile, Théocrite s'était élevé au ton de l'ode et de l'épopée pour célébrer la gloire de Ptolomée et d'Hiéron.

il

Le poète latin pourrait répondre à ses critiques ce que Corydon dit à Alexis, dans la seconde églogue, habitárunt di quoque silvas. Les muses sont nées dans les chants, et les premiers poètes furent des bergers. Au temps d'Homère, existait peu de grandes villes; la gloire d'Achille fut sans doute célébrée dans quelque cabane rustique; les anciens poètes ont tous été inspirés par le spectacle de la nature; Apollon gardait alors les troupeaux, et la lyre d'Orphée enchantait les forêts.

« PreviousContinue »